COULEURS-DE-LA-VIE

Un texte que je ne pensais pas écrire un jour.

Parce qu’il accuse autant qu’il avoue.

Parce qu’il me concerne.

Parce qu’il nous concerne.

Aucune révolte ne naît sans conscience.

Ce texte est le mien.

À chacun de décider ce qu’il veut en faire.

On a tout vu. Et moi, j’ai obéi ...

Je n’ai pas levé le poing.

Je n’ai pas crié dans la rue.

Je n’ai pas désobéi.

J’ai vu les murs se dresser,

les mots se durcir,

les Libertés s’effriter.

J’ai vu des hommes tomber

parce qu’ils pensaient trop haut,

parce qu’ils parlaient trop vrai.

Et j’ai obéi ...

J’ai vu des chaînes qu’on ne voit plus,

des silences imposés,

des vérités floutées.

J’ai vu des foules pleurer en ligne,

et des peuples s’effacer sans bruit.

Et j’ai obéi ...

J’ai vu des familles fuir,

des regards s’éteindre,

des cris que personne n’entendait.

J’ai vu des corps abandonnés,

des enfants qu’on n’a pas protégés.

Et moi,

j’ai détourné les yeux.

Et j’ai obéi ...

Je viens d’une lignée

qui a risqué sa vie pour dire “non”.

J’ai grandi avec leurs histoires,

leurs cicatrices, leurs victoires.

Et je les ai trahis.

Sans un mot.

Sans un geste.

J’ai râlé, oui.

Comme tout le monde.

J’ai partagé. J’ai pesté.

J’ai dit que c’était injuste.

Mais j’ai continué à vivre comme si ça ne m’impliquait pas.

J’ai obéi ...

À chaque règle.

À chaque recul.

À chaque injonction masquée dans un mot "pour le bien de tous".

J’ai obéi ... 

Ils sont moins de 1 %.

Nous, des millions.

Mais ils savent.

Ils savent que tant qu’on aura peur de perdre un peu,

on préférera tout céder.

Et moi, j’ai cédé.

Je me suis cru lucide.

Je me suis cru éveillé.

Mais je n’étais qu’un de plus.

Un de ceux qui voient, qui comprennent,

et qui baissent les yeux.

Ce texte n’est pas une leçon.

Ce n’est pas une prière.

C’est un aveu.

C’est la honte que je porte avec vous.

Celle d’avoir connu les leçons du passé,

et de n’avoir rien retenu.

Ce texte n’est pas un appel.

C’est un rappel.

Que tant qu’on obéit,

on construit nous-mêmes la prison qu’on redoute.

Et qu’un jour, il faudra choisir :

vivre debout …

ou s’éteindre en silence.

Dan.