Qui était Rosa Parks ?
En 1955, dans une Amérique déchirée par la ségrégation raciale, Rosa Parks refuse de céder sa place à un passager blanc dans un bus de Montgomery (Alabama). Arrêtée par la police et condamnée à une amende, elle fait appel de son jugement et devient l’égérie d’un mouvement national de défense des droits civiques.
Son nom est resté un symbole, celui de la défense des droits des Noirs dans une société gangrenée par la ségrégation raciale.
La militante américaine des droits civiques Rosa Parks est née le 4 février 1913 dans la ville de Tuskegee, en Alabama. Sa mère, institutrice, lui inculque des valeurs d’égalité et de liberté et la scolarise à la Montgomery Industrial School for Girls, fondée par des Blancs du Nord pour les enfants noirs de Montgomery, ex-capitale des États confédérés. Une école d'ailleurs incendiée à plusieurs reprises par le Ku Klux Klan (KKK).
En ce début de XXème siècle, l’Alabama applique un racisme institutionnel conformément à un arrêt de la Cour suprême des États-Unis, Plessy v. Ferguson, rendu le 18 mai 1896. Selon la doctrine "separate but equal" (séparés mais égaux), ce dernier autorise les États du Sud à imposer par la loi des mesures de ségrégation raciale. Pour se rendre à l’école, la fillette fait donc le trajet à pied, car les bus sont réservés aux Blancs.
L’engagement au NAACP
A 19 ans, elle épouse Raymond Parks, un militant des droits civiques membre de section de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) de l’Alabama, et termine ses études secondaires deux ans plus tard - fait rare pour les Noirs à l’époque, et plus encore pour les femmes noires. Son niveau d’études ne suffit pas à faire oublier sa couleur de peau, et la jeune femme ne peut exercer que des professions manuelles : couturière, femme de ménage ou aide-soignante. Elle milite à partir de 1943 au NAACP, partisan de la déségrégation, où elle officie comme secrétaire.
Le 2 mars 1955 a lieu l’acte de désobéissance civile qui la fait entrer dans l’histoire : alors qu’elle rentre chez elle après une journée de travail, elle s’installe dans la section du bus réservée aux Blancs, et refuse d’en bouger lorsque le chauffeur lui demande de se déplacer. Outré, le chauffeur appelle la police, et l’histoire atterrit devant les tribunaux. Rosa Parks devient alors le symbole de la rébellion.
Rosa Parks, une icône de la lutte contre la discrimination raciale
Ce n’est certes pas la première fois qu’un Noir refuse de se plier aux règles de la ségrégation raciale en vigueur, et l’idée de faire un sit-in dans un bus public ne vient pas de Rosa Parks. Parmi ses prédécesseurs, on peut énumérer Bayard Rustin en 1942, Irene Morgan en 1946, Lillie Mae Bradford en 1951, Sarah Louise Keys en 1952, et la lycéenne Claudette Colvin, elle aussi membre du NAACP, qui ont toutes choisi ce mode d’action.
Elle écrira plus tard dans son autobiographie Mon Histoire (aux éditions Puffin Books) :
"On dit toujours que je n’ai pas cédé mon siège parce que j’étais fatiguée, mais ce n’est pas vrai. Je n’étais pas fatiguée physiquement, pas plus en tout cas qu’après une journée de travail habituelle. Je n’étais pas vieille. J’avais 42 ans. Non, je n’étais fatiguée que d’une chose : j’étais fatiguée de céder."
Un appel à boycotter les bus de Montgomery
Inculpée pour troubles à l’ordre public et non-respect des lois de ségrégation locales, Rosa Parks risque l'emprisonnement. Elle s’adresse pour sa défense à l’avocat Edgar Nixon, membre influent de la NAACP. Ce dernier, saisissant immédiatement la portée symbolique du combat qui s’annonce, confie la défense de Rosa Parks à un avocat blanc, Clifford Durr, qui transforme la défense de sa cliente en manifeste anti-ségrégation. En parallèle, un groupe de militants Afro-Américains se réunit autour d’un jeune pasteur alors inconnu : Martin Luther King. Ensemble, ils mettent en place un mouvement de désobéissance civile et décident de boycotter les bus de Montgomery.
Les Noirs solidaires du mouvement, rejoints par des Blancs opposés à la ségrégation, cessent d’emprunter les bus publics : ils vont travailler à pied, à vélo ou dans des taxis conduits par des chauffeurs noirs qui abaissent leurs tarifs. Rien ne fait reculer les militants, ni la pénibilité des trajets sans transports publics, ni les attentats perpétrés contre Martin Luther King et Edgar Nixon. Le boycott durera 381 jours.
Browder v. Gayle et l’amorce de la déségrégation
Le mouvement initié par Parks, Nixon et King connaît un retentissement national et relance le débat sur la ségrégation. Sous la pression des militants des droits civiques, la Cours suprême annule la ségrégation dans les bus le 13 novembre 1956, par l'arrêt Browder v. Gayle. Dès l’annonce de la nouvelle à Montgomery, le boycott cesse. Mais il faudra encore attendre près d’une décennie, et le Civil Rights Act de 1964, pour que les lois Jim Crow soient abrogées, mettant fin définitivement à la ségrégation.
Et Rosa Parks ? Elle reprend son travail de couturière, puis s’engage en politique dans l'équipe du représentant démocrate du Michigan, l'Afro-Américain John Conyers. Restée une icône des droits civiques, elle meurt à Détroit dans la pauvreté en 2005. Elle reçoit des funérailles nationales et les hommages du président George W. Bush, qui ordonne la mise en berne de tous les drapeaux fédéraux le jour de son enterrement.
L’hommage le plus significatif est sans doute rendu par la société des bus de Montgomery, qui bloque durant plusieurs jours l’accès aux places avant dans ses bus, recouvertes d’une photographie de Rosa Parks ainsi légendée :
"La société de bus RTA rend hommage à la femme qui s'est tenue debout
en restant assise".
MARINE JEANNIN
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